Au large de l’Atlantique, une équipe de plongeurs de Capbreton a posé ses palmes à Nazaré pour une mission pas comme les autres : documenter la vie fixée des fonds et repérer d’éventuels « coraux communs » présents à la fois près du Gouf de Capbreton et dans le canyon portugais. L’objectif est simple et ambitieux : mieux comprendre ce que ces reliefs sous-marins jumeaux ont en partage, et comment cette parenté façonne la biodiversité locale.

Pourquoi le canyon de Nazaré attire les explorateurs ?
À Nazaré, la mer plonge brutalement vers les profondeurs. Ce relief unique canalise l’énergie de l’océan, nourrit des eaux riches et crée des habitats variés pour les espèces benthiques. Pour des plongeurs-naturalistes, c’est un terrain d’étude idéal pour observer éponges, gorgones, bryozoaires et autres organismes constructeurs qui colonisent les parois, surplombs et dalles rocheuses.
Objectifs de l’expédition
- Repérer des « coraux communs » — c’est-à-dire des espèces ou assemblages présents dans les deux canyons, indicateurs d’affinités écologiques.
- Comparer les communautés benthiques entre Capbreton et Nazaré : diversité, densité, état de santé des peuplements.
- Documenter les habitats par photo et vidéo pour faciliter l’identification et la sensibilisation du public.
- Renforcer les liens entre les deux villes atlantiques via des retours d’expérience et de la médiation scientifique.
Qu’appelle-t-on « coraux communs » ici ?
Le terme est volontairement opérationnel : il désigne des taxons constructeurs d’habitat (gorgones, madréporaires non hermatypiques, hydrocoralliaires, etc.) observés dans des conditions environnementales proches au sein des deux canyons. Leur présence simultanée donne des indices sur la circulation des masses d’eau, la nature des substrats et la stabilité des micro-habitats.
Méthode de terrain et rigueur naturaliste
L’équipe alterne plongées d’observation et relevés standardisés. Sur le fond, les plongeurs procèdent à :
- Transects visuels pour estimer la composition des peuplements.
- Photogrammétrie (quadrats photographiques) afin de suivre l’évolution des colonies dans le temps.
- Prises de notes in situ sur exposition, rugosité, profondeur et température.
De retour à terre, les images sont triées, étiquetées et intégrées à une base descriptive afin de comparer, à efforts d’échantillonnage similaires, les assemblages de Capbreton et de Nazaré.
Ce que la mission peut apporter à Nazaré et à Capbreton
- Des données utiles pour suivre l’état des habitats fixes et détecter d’éventuels changements (réchauffement, turbidité, pression d’usage).
- Une cartographie affinée des sites où les espèces clés se concentrent, afin d’orienter les futures immersions et actions de sensibilisation.
- Un récit commun entre deux territoires atlantiques qui partagent un patrimoine géologique et culturel lié à la mer.
Les défis d’une exploration en canyon
Plonger sur les marges d’un canyon exige de composer avec la visibilité, les courants et les profils en dents de scie des fonds. La sécurité est prioritaire : plan de plongée prudent, redondance du matériel, fenêtres météo soigneusement choisies et binômes expérimentés. Ces contraintes expliquent la valeur des observations récoltées : chaque minute gagnée au bon endroit compte.
Premiers enseignements attendus
Si des espèces communes sont confirmées, cela confortera l’idée d’un continuum écologique atlantique où reliefs, nutriments et courants façonnent des paysages biologiques comparables. À l’inverse, des différences marquées de composition pourraient révéler l’influence de facteurs locaux (sédiments, apports côtiers, microclimats océaniques) et orienter des études complémentaires.
Transmission et sensibilisation
Au-delà des spécialistes, la mission vise le grand public. Images, conférences et expositions permettent d’illustrer la richesse des fonds de Nazaré et du Gouf de Capbreton. Mieux connaître ces milieux, c’est aussi encourager des pratiques respectueuses : mouillages maîtrisés, limitation des contacts sur le fond, et choix de périodes propices pour minimiser l’impact.
Et la suite ?
Les plongeurs envisagent de prolonger l’effort : retour saisonnier sur les mêmes stations, standardisation des protocoles et partage des résultats avec les communautés locales. À terme, l’ambition est de bâtir une chronologie d’images et de mesures capable de raconter, année après année, l’évolution de ces cathédrales sous-marines.
Conclusion
L’expédition Capbreton → Nazaré pose la première pierre d’un suivi comparé des canyons atlantiques. À travers la quête des « coraux communs », elle propose une lecture positive de l’exploration : observer, comprendre, transmettre. La mer a ses reliefs secrets ; à nous de les apprivoiser sans les abîmer.